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Prédication du dimanche 21Juin
Texte : Jean6 : 51-58
Le texte de ce matin fait partie des passages troublants lorsqu'il est pris
dans le sens littéral. Pour vous rappeler le contexte du récit de ce jour, Jésus a
nourri mystérieusement la veille une grande foule avec les cinq pains d'orge et deux
poissons que quelqu'un avait avec lui, et ce fut une telle réussite que la nourriture
était disponible à volonté et, malgré tout, il en resta douze corbeilles. Alors,
évidemment, les gens veulent revivre l'expérience. Mais là le ton change. Jésus
invite les gens à se mettre au travail pour trouver une autre sorte de pain, un pain
qui procure une vie sans fin, un pain que lui seul peut donner. Et quand les gens
disent : bien sûr qu'on veut de ce pain qui donne une vie sans fin, donne-le nous,
Jésus répond : mangez-moi! Vous devinez facilement la surprise des gens et leur
question : comment est-ce possible? Essayons donc de comprendre de quoi il s'agit
ici.
Malgré la promesse que Dieu leur avait faite, les fils d'Israël, en découvrant
la manne au désert, s'étaient demandé l'un à l'autre: «Qu'est-ce que cela?» (Ex.
16:15 ex 16.13-21). La même incrédulité se montre chez leurs descendants. Ils
discutent entre eux au sujet de l'étrange nourriture dont Jésus leur a parlé: sa chair
et son sang, c'est-à-dire sa mort. Un Christ vivant ici-bas ne suffit pas à faire vivre
notre âme. Il faut nous approprier sa mort (en figure manger sa chair et boire son
sang) pour avoir la vie éternelle. Ensuite nous avons chaque jour à nous identifier
avec Lui dans sa mort. Nous sommes morts avec Lui quant au monde et au péché.
L'homme naturel ne peut comprendre cela. Il veut bien d'un modèle, mais il lui est
trop dur de reconnaître son propre état de condamnation dont lui parle la mort de
Christ.
Il nous présente un Jésus qui dit : « Jean 6:51Je suis le pain vivant qui est
descendu du ciel. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement; et le pain
que je donnerai, c’est ma chair, que je donnerai pour la vie du monde. » Je traduis le
mot chair par« moi-même »Dans ce verset « moi-même » est dit d'une façon qui
n'est peut-être pas lisible à première écoute : « c'est ma chair ». "Ma chair" est une
façon hébraïque de dire moi-même. Il y a plusieurs façons de dire moi-même en
hébreu (puisque ça parle hébreu par dessous le grec), même pour dire l'homme, on
dit « la chair et le sang », ou « la chair ». Pour dire "moi" je peux dire « ma chair »,
mais je peux dire aussi « mon esprit », « mon âme (ma psyché) » ; je peux dire «
mon os » ou « mes os ». Nous avons ensuite des expressions doubles comme « la
chair et le sang » qui veut dire l'homme. On peut dire aussi « le cœur et les reins ».
La chair désigne tout ce que Jésus est, sa manière de vivre. Le sang désigne sa vie,
mais en particulier sa vie donnée jusqu'à accepter la souffrance et la mort. La chair
de Jésus n'est pas comme une statue qu'on regarde, mais c'est une existence
concrète qu'on accepte d'embrasser, d'incorporer comme on croque une pomme. Et
qu'est-ce qui caractérise cette vie? Bien sûr, il y l'amour sans limite et sans condition
qui a marqué chaque décision de sa vie. Mais il y a aujourd'hui un autre aspect que
je veux souligner : chaque seconde de sa vie était quelque chose qu'il recevait
comme un don, comme une parole de Dieu, comme un moment à vivre pleinement.
En regardant chaque seconde de sa vie, on peut dire : oui, je veux vivre
cette seconde, je veux l'accueillir de tout mon cœur, elle fait partie de moi, ou à
l'inverse dire : je ne veux pas de cette vie. Et il est facile de comprendre pourquoi on
veut fuir ces secondes : elles sont remplies soit d'ennui, soit d'angoisse, soit de
souffrance.
Pourtant, il y a des gens qui agissent autrement. Sur le plan humain, une
personne qui est en amour trouve souvent chaque instant merveilleux. Mais quand
est-il sur le plan spirituel? C'est plus mystérieux. Pour beaucoup de chrétiens, il y a
le sentiment que leur vie et que le temps qui passent sont habités par une présence
reliée en leur foi en Jésus ressuscité; il y a le sentiment que leur vie et les
événements de la vie ont une dimension qui les dépassent; il y a le sentiment d'être
aimé de manière unique et que le secret de la vie est cette histoire d'amour. Alors
ces chrétiens comprennent les multiples sens de l'expression : « Quiconque mange
ma chair… a la vie sans fin. » Ils goûtent à l'intimité de Jésus ressuscité en
communiant à ce qu'ils connaissent de sa vie. En même temps, ils croquent dans les
événements de leur propre vie, parce qu'il s'agit de la suite de cette vie qu'a
assumée de tout son être le Nazaréen.
Le texte de ce jour est largement utilisé dans le contexte de la sainte cène.
Vous comprendrez que réduire les paroles de Jésus sur le pain de vie à une
invitation à aller communier comporte quelque chose de biaisé, voire faux. Tout
d'abord, manger symboliquement le corps et le sang du Christ veut d'abord exprimer
ce qui se passe tous les jours dans ma vie, où je croque à ma vie comme Jésus l'a
fait lui-même, et par là je fais un avec lui. Ensuite, ce geste proclame ma foi que
dans ma vie biologique, psychologique et sociale, il y un mystère à l'œuvre qui me
dépasse. Et n'allons pas imaginer cette vie dont parle Jésus comme des globules
rouges qui couleraient avec les globules blancs et rouges dans notre sang; cette vie
est indissociable de la vie humaine dans sa pleine grandeur devant Dieu, comme fut
celle de Jésus.
Quand on regarde les détails de sa vie, on est devant un choix : y plonger et
l'assumer ou la fuir, i.e. choisir de vivre ou choisir de mourir. Quel est le vôtre? Amen
Une prédication du PPDP KENFACK Raymond